La Motivation de l’Huître

Cher ami lecteur, je ne te présente pas l’huître, ce mollusque marin bivalve et riche en protéines, qui vit dans l’eau salée et que tu manges, vivante, principalement pendant les mois de décembre et janvier.

Après observation de cet être encoquillé et fruste, tu peux constater que l’huître, dépourvue de tête donc de cerveau, ressemble à un gros mouk et ne semble affectée par rien, pas même sa propre mort ; la seule perturbation qu’on lui connaît est l’aspersion par le citron, qui provoque une très légère rétractation t’informant que tu ne vas pas consommer un cadavre, ce qui, en dehors du citronnage, est particulièrement difficile à distinguer.

En l’occurrence, l’huître semble afficher placidement un lâcher-prise maximal, une résilience absolue face à une mort atroce par gobage puis digestion, mais aussi, et c’est moins bouddhiste, une motivation proche de zéro mais compréhensible en regard de son absence totale de dynamisme.

Hé bien, ami lecteur, en ce mois de janvier 2017, je me sens totalement solidaire de ce petit mollusque que j’ai pourtant consommé sans aucune trace de remords pendant les fêtes.

En effet, ce matin, l’actualité me plonge dans un abîme de perplexité, et un néant d’inspiration littéraire. J’ai donc appris que :

  • Manuel Valls s’est pris une pichenette par un breton plus grand que lui, provoquant des débats si passionnants que j’ai fait une petite sieste d’huître ;
  • Un attentat suicide a fait 47 morts dans un camp militaire au Mali, c’est moche, mais vu de ce qu’on se prend tous dans la tronche depuis deux ans, je me suis sentie comme l’huître, un brin blasée et surtout très molle ;
  • L’enquête sur Jean-Marc Morandini concernant le harcèlement a été classée sans suite, sans doute le jury l’a-t-il confondu avec Pine d’Huître, provoquant une sollicitude inédite (et un jeu de mot pourri de ma part) ;
  • Il fait très froid dans toute la France, je crois bien que je vais fabriquer une perle tellement je suis en hypothermie.

Alors ami lecteur, est-ce grave ? Suis-je en train de vivre une métamorphose kafkaïenne, non pas sous la forme d’un rampant, mais en un être amorphe et visqueux, à la force d’inertie la plus puissante du monde animal, prête à voter pour n’importe qui en mai prochain ? Sérieusement, qui te stimule, toi, ami lecteur ? A la fois, quand j’apprends que l’on va supprimer des programmes scolaires le complément d’objet, je me demande bien si ma vie de mollusque ne sera pas plus adaptée, d’autant qu’il existe une option d’auto-reproduction de l’huître, hermaphrodite cyclique, ce qui me permettra enfin de comprendre ce que pensent les hommes. Et ça, ami lecteur, c’est la promesse, non pas de la félicité, car en solo, ce n’est pas très funky, mais au moins, de la fin des prises de tête !

A la semaine prochaine ! Et d’ici là, comme j’aurai changé d’avis, tu me trouveras probablement au bord d’une mare à chercher la bonne grenouille, celle transformable en prince charmant, ce qui n’est pas gagné car elles sont toutes sur Tinder maintenant ! A moins que je n’aie attrapé la grippe, un million de malades, la headline du jour, témoin d’une activité fascinante qui va me ramener illico presto vers un bon bouquin sous ma couette !

 

Tschüss !

(Crédits photo Walt Disney Pictures)