Beaucoup de gens se plaignent que les infos ne présentent que des mauvaises nouvelles, que notre société va mal, la Terre meurt à petit feu, bref, les lendemains ne chantent pas, expression en général optimiste (sauf s’il s’agit d’une chanson de Maître Gims).
Hé bien, je suis désolée de rajouter une couche de beurre sur la tartine, mais il y a un nouveau phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur et qui commence à me faire pas mal flipper lors de mes loisirs divers (promenades, dîner au restaurant, visionnage de film) : il s’agit de l’être humain botoxé, actuellement ce qu’il y a de plus proche de l’extra-terrestre, tel que défini dans les années soixante.
Hier, en effet, j’ai regardé un film français récent, « Le Talent de mes Amis ». Un des héros va voir sa mamie en institut. Je me suis dit : « Elle ressemble drôlement à Jeanne Moreau, cette actrice ». Et puis je me suis dit que ça ne pouvait pas être elle, sa voix et tout le bas de son visage avaient l’air d’appartenir à une autre personne.
Surprise Elise, c’était bien son nom qui était crédité au générique.
Et alors je me suis demandé : mais POURQUOI ? Qu’est-ce qui cloche avec toutes ces personnes ? (Je dis bien personnes, car il semble que la botoxite touche de plus en plus d’hommes, Patrick Dupond, Michel Sardou, on n’est pas ici pour faire des listes, même si on pourra bientôt en établir une aussi longue que la généalogie du Christ, et ça fait peur).
Bon, je veux bien souper deux minutes du baratin sur la pression d’être en permanence exposé, le tyrannie de l’image, les contrats qui passent sous le nez proportionnellement au nombre de rides, etc. OK. Vieillir n’est simple pour personne (sauf peut-être pour quelques moches qui s’en foutent). Mais on peut se demander si l’inactivité de ces personnes aux professions souvent intermittentes, ne serait pas à l’origine de ces faces ravagées que NOUS sommes obligés de contempler. Non mais sérieusement, ces personnes mériteraient qu’on leur colle un miroir dans la tronche, afin de pouvoir enfin faire preuve d’un peu d’empathie face à la vision d’horreur de ces faciès brillants et boursouflés. Seulement, se regarder soi-même, ce n’est pas regarder quelqu’un d’autre, et à plus forte raison quand on a du temps pour le faire.
C’est ce qu’on pourrait appeler le syndrome du microscope. Quand une copine (arbitrairement choisie de sexe féminin, mais de plus en plus d’hommes sont susceptibles de poser la question) vous parle de ses rides, c’est souvent qu’elle est la seule à les voir (alors que les vraies marquées évitent d’attirer l’attention sur le sujet), mais le truc c’est qu’elle l’a tellement observée dans la partie grossissante du miroir de sa salle de bains, qu’elle n’arrive plus à la voir autrement (à peu près comme la faille de San Andrea). On imagine sans grande difficulté ce qui se passe quand de VRAIES rides font leur apparition, curieusement, la discrétion revient et un nouvel ami apparaît dans l’agenda : le chirurgien plasticien.
Mais franchement, quel est l’intérêt réel d’abandonner son vrai visage et ses expressions si ce n’est pour profiter encore un peu de sa garde-robe de jeune première et – passez-moi l’expression – du lever du petit jeune ? Quelle autre finalité que d’être cougar ou vieux beau et prétendre qu’on n’a pas l’âge qu’on a ?
D’autant plus qu’il ne peut pas s’agir d’une réelle question d’esthétique quand on voit ce que sont devenues, allez au hasard, Meg Ryan ou Courteney Cox, pourtant deux références en matière de beauté ? La vision de ces personnes, qui comble de la toxine, paraissent désormais plus que leur âge, provoque un sentiment de pitié, aussitôt suivi du soulagement de ne pas ressembler à ces têtes pathétiques, voire dans certains cas, à la limite du monstrueux (Jocelyne de Wilderstein, Thierry Mugler…)
Alors Hollywood peut arrêter de fabriquer des faux macchabées pour ses films de zombies : il n’a qu’à recycler ses actrices vieillissantes. Quant à moi, je vais prendre exemple sur feu ma maman, qui ne mettait qu’un peu de mascara, une crème de jour et un contour des yeux, et paraissait quinze ans de moins.
Finalement, la beauté et l’air de jeunesse résident dans ce vieux cliché qui dit que tout se passe à l’intérieur, qu’il faut s’aimer tel que l’on est et aimer les autres, ce que ma mère faisait à la perfection (quinze ans de moins, pensez-y !) Je vais donc continuer de froncer les sourcils autant que j’en ai envie, et surtout, continuer à me prendre des fous rires quand bon me semble. J’aurai peut-être le visage ridé que je mérite, comme le disait Cocteau, mais au moins, on ne pourra pas dire que je n’aurais pas rigolé.
Alors, ami lecteur, économise-toi toi aussi tes consults en plastique chez le chirurgien, et reviens rire avec moi la semaine prochaine, car je suis de retour !