Cher ami lecteur, je n’avais pas l’intention de parler de ce phénomène, mais un ami m’a récemment envoyé un article où un professeur de l’ESSEC rapproche l’expérience de Pokémon Go du doute hyperbolique de Descartes.
Puis-je remplir une ligne de mon article d’esclaffements ?
Non mais sérieux ?
Cette débilité de jeu, qui n’a, ceci dit, pas fait long feu au niveau des jeunes scolarisés avec la rentrée puisque bon nombre d’établissements l’ont interdit dans leur enceinte, serait en fait une preuve de notre capacité à nous interroger sur nous-mêmes et remettre en cause la réalité de ce que nous voyons. Rien que ça.
Donc en gros, quand tu joues, tu philosophes en même temps, tu t’élèves.
Un peu plus haut dans la connerie sans aucun doute, pour le coup.
Je vais de mon côté m’interroger sur la philosophie du pet, qui est un moyen d’expression de mon moi intérieur, avec une recherche épistémologique du message caché de mon transit, non mais stop !!! in the name of love.
Il n’y a rien de plus dans Pokémon Go que dans le Tetris sur la Game Boy, sauf évidemment les moyens technologiques mis en œuvre pour développer le jeu. Ah si, le jeu renvoie aussi à nos envies de collection (des timbres, des petits cochons, des capsules de bouchons de champagne, que sais-je, il y a tant de merdes qu’on peut collectionner), et là, c’est plus intelligent, puisque l’objet de la collection est virtuel, il ne s’entasse donc pas sous un tas de poussière dans le garage, comme toute collection au bout d’un moment.
Et alors, ça change quoi ?
On était aussi accaparés par Tetris qu’on peut l’être aujourd’hui par Pokémon Go. Des philosophes s’étaient-ils interrogés sur la question ? Un spinozien avait-t-il un avis à formuler ? Non ! Parce qu’on s’en fout. Et parce que les modes passent. Un beau matin, on en a marre, et on arrête de jouer. Et un autre jeu, après Candy Crush et Pokémon Go, peut alors sortir de terre.
L’être humain a toujours cherché à se divertir, depuis les orgies de nos ancêtres romains au cinéma en 3D, en passant par la WII, les casinos, les comédies musicales, bref. Bon le truc, c’est juste que maintenant, ça devient hyper dangereux, puisque, selon une étude Ifop, 3 millions de français joueraient à Pokémon Go au volant de leur voiture. Génial. Tu n’étais déjà pas tranquille, à pied, avec les pickpockets et autres agressions de rues, maintenant tu dois en plus te défendre contre des abrutis jouant à un jeu débile en inconscience absolue du moment, à chasser au volant de petits êtres virtuels s’appelant Picatchu.
Au moins avec Tetris, on ne faisait suer personne.
Et pour cause, non seulement on était statiques, mais en plus, Internet n’était pas là à relayer chaque micro-pet sociétal comme s’il s’agissait d’une information capitale.
Mais le truc le plus incroyable reste quand même que les développeurs de la société Niantic, responsable de ce jeu successful, sont allés explorer le no-limit de la décence en plaçant des pokéstops (cubes bleus virtuels servant à recueillir des accessoires virtuels) sur le mémorial de la déportation de Drancy. Rien qu’en écrivant la phrase, je me dis qu’il est inutile de la commenter. Et pourquoi pas en mettre aussi deux trois à Auschwitz, ça pourrait être rigolo, non ? Et à l’intérieur d’une église ou d’une morgue ? Sans blague ?
Evidemment, ces cubes ont depuis été supprimés, mais il a quand même fallu un courrier du député-maire de la commune pour que ce soit fait.
On marche sur la tête.
Alors je ne saurais que trop te rappeler tes cours de français et de philo, ami lecteur, en te recommandant de te méfier de toute esquive d’une réalité déplaisante, car, comme disait Pascal, spécialiste ès-divertissement, « l’homme est visiblement fait pour penser, c’est toute sa dignité et son mérite ; et tout son devoir est de penser comme il faut. »
En gros, ami lecteur, joue, mais pas toute la journée.
Sans quoi, tu risques, au mieux une panne de cerveau, au pire, un grave accident de la circulation, et ça, mourir pour attraper un Pokémon, c’est vraiment une épitaphe de bolos.
A la semaine prochaine !!!