Mon meilleur ami m’a dit l’autre jour que j’écrivais trop sur des sujets politiques, et qu’à force de m’indigner, j’allais finir par faire au minimum un ulcère.
Afin de ne pas finir dissoute par ma propre bile, j’ai donc décidé de suivre son conseil et de parler aujourd’hui d’un sujet qui ne va énerver personne, puisqu’il s’agit de la nature, et des animaux qui la peuplent. En fait, pour être tout à fait précise, c’est en me promenant que j’ai réalisé à quel point nous étions désormais entourés – que dis-je, envahis – par les blaireaux et les morues.
Bien qu’a priori totalement différents, l’un évoluant sur la terre ferme, l’autre dans les eaux troubles, ces deux êtres vivants présentent cependant de nombreux points communs entre eux.
Mais aussi et surtout, entre eux et le genre humain.
Nous avons donc beaucoup à apprendre en les observant.
Notamment, comment les éviter et surtout, comment éviter de leur ressembler.
Communément, le blaireau est un carnivore aux poils raides, plantigrade, se creusant un terrier profond et ramifié pour y passer l’hiver et se nourrissant des aliments les plus variés.
Devant l’extension des constructions un peu partout et surtout l’explosion du chômage en milieu extra-urbain, le pauvre blaireau n’a pas eu d’autre choix que de migrer vers les villes, afin de trouver de quoi se sustenter.
La morue quant à elle, est un grand poisson de l’Atlantique Nord, faisant l’objet d’une pêche intensive. Mécontente de cette situation peu favorable, elle a décidé d’inverser la tendance et de partir elle-même à la pêche, par ses propres moyens.
Traditionnellement, ces deux catégories animales suivaient un rythme saisonnier à savoir débarquement en masse dans une station balnéaire pauvre mais peuplée en août, avec changement radical des habitudes de consommation au profit de churros et de roteuse.
Jusqu’à présent, il était assez simple de les éviter du fait de l’unité de temps, de lieu de leurs déplacements, et surtout, du fait de ce qu’ils croient être une adaptation de leur tenue à une saison estivale : tongs en plastique, marcel de couleur douteuse, shorts ou minijupes synthétiques criards, casquette-visières sponsorisées par une marque d’apéritif bas de gamme, le repérage était assez aisé.
Et puis, selon un principe tout darwinien, les espèces ont migré.
On les trouve désormais partout, à n’importe quel moment de l’année, et le pire du pire : ils se sont désormais fondus dans la masse. Morues et blaireaux s’habillent désormais chez The Kooples, comme vous et moi, portent une barbe de hipster macroniste et des hauts en dentelle, mangent des tapas dans des endroits branchés. On pourrait raisonnablement se dire : tant mieux, ils ont découvert le bon goût. Que nenni. Adaptation, multiplication, nouvelle branche mutante. Camouflage. Blaireaux et morues sont devenus des espèces intérieures.
Et ça fait très peur.
On ne se méfie pas, et soudain hop ! Nous voilà au mieux, contaminés, au pire, leurs victimes.
Quelques astuces pour te permettre de les repérer, ami lecteur.
Blaireaux et morues disent tout le temps les mêmes trucs : lui : je veux être libre (comprendre : fornications multiples, sans engagement un peu comme dans certains forfaits) ; elle : baisons sans engagement et puis on verra (comprendre : fais-moi un double de tes clés, prépare une étagère et un barbeuc avec tes parents).
Blaireaux et morues, s’ils ont amélioré leur goût vestimentaire et vont désormais aux expos (cri de Munch, tu peux les croiser là-bas), n’ont généralement aucun bouquin chez eux ni aucune piste de réflexion dénombrilisante. En revanche, on trouve du matériel hi-tech : écran ultra fin incurvé chez le blaireau afin de suivre tous les matches, sécheur de vernis ionisant et épilateur laser chez la morue.
A savoir, les biens matériels étant pour eux d’une valeur bien plus estimable qu’une cervelle pleine et bienveillante, tu pourras aussi noter de leur part une attention excessive à leurs véhicules (blaireaux) ou à leurs sacs à mains et chaussures (morues).
Et pire que tout, blaireaux et morues t’aspirent le cerveau en te parlant des heures d’un sujet unique qui les passionne : eux.
Et ça, c’est vraiment rude.
Te voilà donc paré, cher ami lecteur, avec ton papier tue-mouches et ta bombe anti-rampants, et tous ces bons conseils, pour te délester de tous les parasites qui pourraient t’empêcher d’être toi-même (un être exceptionnel et merveilleux) et surtout, qui te voleraient du temps que tu pourrais consacrer aux personnes qui te veulent réellement du bien. Car c’est avec ceux et celles-là que tu feras les meilleurs apéros.
Bon dimanche, ami lecteur, la vie est courte, alors profite et en bonne compagnie !
A la semaine prochaine !